mercredi 23 juillet 2008

NOUS DEVONS CREER UNE SOLIDARITE NOUVELLE


« Mes préférences iront toujours à un docker anversois plutôt qu’à un bourgeois de Charleroi » - André COOLS

Ce 21 juillet, la Belgique a fêté son 177e anniversaire. Le 18 juillet, les socialistes commémoraient le 17e anniversaire de la tragique disparition d’André COOLS, Ministre d’Etat.

Associant ces anniversaires au difficile contexte politique actuel, je me suis remémorée cette phrase prononcée, le 28 octobre 1978, par André Cools à la tribune du congrès constitutif du Parti Socialiste : « Mes préférences iront toujours à un docker anversois plutôt qu’à un bourgeois de Charleroi ! ». Le PSB-BSP, dernier parti unitaire de Belgique, dont Cools était le co-président, se communautarisait, suite à une nouvelle crise provoquée par le CVP de l’époque. C’était il y a 30 ans…

L’homme résume, a lui seul, la Belgique ouvrière ; grand-père flamand immigré dans le bassin industriel liégeois, père militant socialiste déporté et martyr des nazis, André Cools est né et a vécu dans le Flémalle des charbonnages et des usines.

Le député-maïeur de Flémalle a été l’un des grands défenseurs de la Wallonie. Il est, avec Terwagne et d’autres socialistes wallons, l’artisan de la révision de la Constitution de 1970, de la naissance des Communautés et des Régions.

Cools en a connu des heures de négociations communautaires pendant lesquelles les mêmes problèmes qu’aujourd’hui divisaient déjà, avec un CVP qui « flinguait » ses propres leaders considérés trop conciliants avec les francophones. Combien d’accords engrangés pour être aussitôt jetés aux orties par une partie de la classe politique flamande ?

Le sens de l’évolution communautaire m’oblige à m’interroger ! Puis-je encore faire miennes les paroles d’André Cools ? La solidarité est une évidence mais quel est l’ordre des priorités ?

Proche du docker anversois…

Le libéralisme économique à outrance et les conséquences néfastes de la mondialisation me portent à hisser haut, bien haut, la bannière rouge de la défense des travailleurs, de tous les travailleurs… La paupérisation et les difficultés rencontrées par les moins favorisés, suite à l’augmentation du coût de la vie, ne connaissent pas de frontières et encore moins une quelconque frontière linguistique belge. Là, je suis vraiment proche du docker anversois !

Proche, pour autant que celui-ci (et partant de là, toute la classe ouvrière flamande) joue le jeu de la solidarité et ne se laisse pas prendre aux propos populistes tels que « plus un franc flamand pour la Wallonie ». Car, si nous faisions le bilan comptable de 177 années de Belgique, nous serions en droit de réclamer un dû à la Flandre. La Wallonie, grâce à ses industries a fait la richesse du pays durant 125 ans, pour seulement 53 ans côté flamand. Non à ce jeu, la Flandre n’est pas gagnante…

Il serait temps que certains au Nord comprennent que ce ne sont pas les francophones qui les ont opprimés au temps de la Belgique unilingue. C’est la bourgeoisie dominante de l’époque (qu’elle soit libérale ou catholique) qui, détenant tous les droits politiques, opprimait le peuple ouvrier ou paysan, qu’il soit flamand, bruxellois ou wallon. D’ailleurs, les patois wallons ou flamands étaient considérés comme le langage de la populace, inconvenants pour la bourgeoisie partout francophone, qu’elle soit de Kortrijk ou de Tilleur.

… mais aussi proche du bourgeois de Charleroi.

Dans le cadre de la mobilisation des Wallons qui travaillent à la relance économique de notre Région, je me sens, aussi, assez proche du bourgeois de Charleroi. Le plan Marshall commence à porter ses effets. Dès lors, la fusion de toutes les bonnes volontés, de tous ceux qui pensent à l’avenir de la Wallonie, qu’ils soient ouvriers, agriculteurs, indépendants ou chefs d’entreprises, est une nécessité. Les Wallons « n’y arriveront » qu’en unissant leurs forces. Le redressement économique est LA priorité et elle doit être l’œuvre de tous dans le cadre d’un pacte social équilibré.

Aujourd’hui, les outrances flamandes, les mesures discriminatoires d’attribution de logements ou de terrains dans certaines communes, les propos populistes de leaders dont l’ascension se fonde sur la seule haine des francophones et des autres communautés, entre autres, me portent à adopter un réflexe de défense communautaire… et, pourraient m’éloigner du docker d’Anvers. On constate une certaine volonté flamande d’aller vers l’indépendance, (près d’un tiers des 88 députés fédéraux flamands ne sont-ils pas, peu ou prou séparatistes, élus comme tels ?) ou du moins de vider l’Etat-Belgique de sa substance et d’en faire une coquille vide au profit d’un état flamand.

Les moments sont difficiles ! Il nous faut trouver politiquement une nouvelle façon de vivre ensemble, mais le fait d’être Flamand ou Francophone ne devrait pas être un obstacle à une solidarité interactive entre nous.
Le docker d’Anvers, le bourgeois de Charleroi, nous tous, nous pouvons et devons contribuer à créer cette solidarité nouvelle …

Linda MUSIN
Députée fédérale
Bourgmestre de Fléron
Carte blanche Le Soir 24.07.08